"Daria Marx, ma vie en gros" est un documentaire qui est passé le 25 février 2020 sur France 2.
Je l'ai vu en replay le lendemain, et j'ai décidé d'en parler aujourd'hui car c'est un sujet important et qui me touche personnellement.
Daria Marx, pour ceux·celles qui ne le savent pas, est une femme grosse. Elle est active sur les réseaux sociaux, a crée "Gras Politique" et rédigé avec Eva Perez-Belle Gros n'est pas un gros mot.
Dans ce documentaire d'une cinquantaine de minutes, on est plongé·e·s dans le quotidien de Daria et de plusieurs de ses proches. Elle y raconte son parcours, et toutes les violences qu'elle a pu rencontrer tout au court de sa jeune vie et qu'elle subit encore aujourd'hui.
La grossophobie existe, et ce documentaire est là pour appuyer des propos que Daria, Eva et les autres essayent de faire entendre. Oui, une femme grosse aura moins dix fois moins de chance d'être embauchée qu'une femme normée. Oui, une femme grosse subira des moqueries et des brimades plus ou moins violentes dans sa vie, que ce soit scolaire, personnelle ou professionnelle. Oui, une femme grosse sera regardée, insultée, humiliée, violentée, parce que grosse. Oui, un·e gros·se aura du mal à accéder aux transports en commun, devra se contorsionner pour passer les portiques ou les allers des trains. Parce que la société ne veut pas des gros·ses. Parce qu'on fait tout pour nous cacher.
Je dis nous, car je suis grosse. Je ne suis peut être pas concernée par tout ce qui a pu se dire dans ce documentaire. Je ne galère pas autant que ces femmes à me vêtir, on ne me regarde pas de travers lorsque je m'assoies à côté de quelqu'un d'autre dans le métro. Il n'empêche que des propos grossophobes, j'en ai subis et j'en entends encore. Des choses anodines du quotidien, que l'on côtoie tous·tes. Des "j'ai mangé comme un·e gros·se", alors que tu es juste à côté, de la part d'une collègue de travail ou d'une amie.
Sur le plan personnel, je ne suis jamais passé par la case diététicienne pour suivre un régime. Au collège, j'étais grosse, mais je n'ai pas été victime de tant d'harcèlement que ça. Bien entendu, je séchais la piscine et préférais avoir zéro en sport plutôt que d'aller en endurance. Car on sait tous·tes ce qu'on risque de se prendre dans la face en y allant. Le regard des autres influent sur notre vision de nous-même. Les remarques, les injures, ça nous détruit à petit feu. Encore aujourd'hui, je ne peux plus aller à la mer, à la piscine ou dans une salle de sport. Je ne mets pas de robe sans collant. Toutes ces privations, elles sont dues à toute cette suite d'événements qui aujourd'hui ont construit ma façon d'être.
Daria, Eva, Sophia, Anouch et Crystal parlent dans ce documentaire de la grossophobie. De leurs vécues. De la violence des médecins, de la famille, de leurs soi-disant ami·e·s, de leurs relations amoureuses. Elles galèrent à trouver du boulot, essayent de vivre car elles sont des êtres humains, comme tout le monde. On cherche à nous masquer, et on nous porte en exemple uniquement dans le cadre de régime. "Mangez bougez et vous ne deviendrez pas comme ça". Comme si la vie était si simple. Comme si le fait d'être gros était seulement dû au fait de manger. Ce documentaire est aussi là pour ça. Expliquer et comprendre les enjeux de la grossophobie, c'est en premier lieu intégrer qu'être gros·se implique des facteurs variés et différents. La précarité, les violences enfantines, les TCA, le stress, l'anxiété. Le schéma classique que l'opinion publique a est tellement loin de la réalité. Mais au fond, les normé·e·s s'en fichent. Ce qui compte, c'est d'effacer ces gros·se·s. Et si iels se font trop entendre, de les enfoncer pour qu'iels finissent par craquer. Combien de fois n'a t-on pas vu des gros·se·s se faire lyncher en place publique parce qu'iels ont osé se montrer, s'exprimer ? On nous déshumanise, et "Daria Marx, ma vie de gros" le montre très bien.
Ce documentaire m'a parlée car je me suis retrouvée dans ce que pouvait dire ces femmes courageuses, qui s'assument malgré un parcours de vie chaotique. Je les admire et je suis de près ce qu'elles font, auprès du collectif Gras Politique ou sur les réseaux sociaux. J'ai recommandé chaudement ce visionnage à mon copain et à mes amies pour qu'iels comprennent. Ce que c'est que d'être gros·se aujourd'hui en France, ce que ça implique, ce qu'on endure. C'est une discrimination qui doit être entendue, n'en déplaise à ceux·celles qui essayent de nous réduire au silence.
Merci Daria Marx, merci à tous·tes celles qui ont pris la parole, dans ce documentaire ou ailleurs. Merci à des femmes comme Boréale d'exister et de participer activement à cette lutte. Nous sommes grosses et nous ne nous tairont pas.
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