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samedi 6 juin 2020

Le consentement de Vanessa Springora


Titre : Le consentement
Autrice : Vanessa Springora
Genre : Littérature contemporaine, témoignage
Editions : Grasset
Parution : 2 janvier 2020
Nombre de pages : 216
Mots clés : témoignage, drame, pédophilie

Mon avis :

On ne présente plus Le consentement, l'ouvrage personnel et poignant de Vanessa Springora. Et j'espère que l'on continuera à en parler, car il est plus qu'important; il est nécessaire.

L'autrice découpe son récit en plusieurs temps. Un premier, sur son enfance. Une famille déchirée, un père absent, une mère soixante-huitarde. On sent bien la détresse dans les mots de Vanessa Springora

Cette peine, son futur bourreau va la ressentir. Cet homme, c'est Gabriel Matzneff, qu'elle nommera G.M tout au long du livre. Elle le rencontre à treize ans, jeune adolescente déjà meurtrie par la vie, délaissée et mal dans sa peau. Lui en a cinquante. A travers les yeux de G.M, elle va se sentir désirée, aimée. Vanessa Springora nous raconte tout cela de ses yeux d'adolescente, de ses souvenirs.

On suit la longue descente aux enfers. L'amour, d'apparat, puis les révélations. Indignée, je le fus bien entendu, même plus que cela encore. Et l'autrice prend le parti pris de nous montrer sa logique d'adolescente. Amoureuse. Consentante sans l'être. Car manipulée par un maître des illusions, un pédophile notoire mais couvert par ses paires. Et on a la rage de lire que c'est en toute impunité qu'il a pu agir. 

Le monde littéraire français est pourri jusqu'à la moelle, et Vanessa Springora nous le montre encore davantage. Un artiste, qu'il soit écrivain, peinte, sculpteur, serait exempt de tout ? Les Gabriel Matzneff, les Paul Gauguin ont agis à leur guise en leur temps, soutenu même. Quand une tribune Les moins de seize ans est signée par de grands noms de l'époque tels que Simone de Beauvoir ou Jean-Paul Sartre, on a des quoi vrillé. Si par la suite, iels ont regretté, se justifiant d'une volonté de "liberté totale", le mal est là. Il n'en demeure que la figure de Gabriel Matzneff est resté longtemps dans le cercle littéraire français. Qu'il a été invité dans de nombreuses émissions, que l'on savait qu'il sortait avec des filles mineures, qu'il couchait avec des garçons à l'étranger. En plus d'être pédophile, il œuvrait à la prostitution enfantine.

L'homme est une pourriture finie, mais Vanessa Springora nous ne nous le dit pas de cette manière-là. Non, elle écrit pour elle, parce que c'est son histoire, son point de vue. Elle est la victime et c'est elle qui mérite d'être écoutée

De sa relation, il lui faut deux ans pour s'en sortir. Deux années de subterfuges, de belles paroles et de faux semblants. Mais l'autrice à l'époque ne le perçoit pas ainsi. Biaisée par une vie qui l'a trahie trop jeune.

Une début de relation idyllique pour la jeune adolescente qu'elle était. Transie d'amour, elle nous le retranscrit de cette manière. Les déclarations épistolaires enflammées, les baisers et moments magiques volés. Il est un Apollon, l'intelligence et la splendeur incarnée.

Mais peu à peu, la main mise de l'homme sournois se fait voir. Commence l'éloignement pour Vanessa Springora de ses proches, de l'école. Elle s'enferme dans cette bulle qu'il a crée, et il détient les ficelles pour la façonner comme il l'entend. Les interdits, elle les écoute. Vanessa Springora ne consacre bientôt sa vie qu'a le satisfaire lui et ses désirs

L'autrice a des propos très justes. Dans ce récit très personnel, elle sait à quel moment intervenir pour passer au présent, à son point de vue actuel. Que l'homme se dit sauveur, expert, comme étant un ange tombé du ciel pour éduquer et inculquer les véritables mœurs à ces jeunes filles perdues. Si c'était vraiment le cas, le point des vues de ces femmes seraient élogieux et en grand nombre. Or, hormis les écrits du pédophile, rien n'est jamais paru. 

Seul un passage me met en désaccord avec l'autrice. Celui où elle fait la différence entre un pédophile récidiviste et un homme qui aurait eu un coup de foudre pour la première fois pour une fille de quatorze ans. Elle pense que les deux sont différents, car pour le premier cas, l'homme réitère et ne ressent de désir que pour des personnes mineures. La pédophilie condamnable. Pour l'autre situation, l'homme dans la cinquantaine est sorti toute sa vie avec des femmes de son âge environ. Ça serait donc la première fois qu'il craquerait pour une fille de quatorze ans. Pour elle, c'est différent. Elle prend bien évidemment les âges qui la séparait de Matzneff. Oui, la manipulation, les dégâts et les séquelles n'auraient pas été présentes. Les deux possibilités sont dissemblables, mais cela demeure de la pédophilie dans les deux faits.

Il y aurait encore tant à dire sur Le consentement, mais ce qu'il faut retenir, c'est que les langues se délient. Cela n'effacera jamais ce qu'a vécu Vanessa Springora, mais la honte doit changer de camp. Victimes, on vous croit, on vous soutient, vous n'êtes pas seules

Note : 4,25/5

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